Baignade et marché sous haute surveillance

Pendant l’été 1776, la seigneurie de Chambly est prise d’assaut par plus de 4 000 militaires anglais et allemands envoyés dans la Province of Quebec pour repousser les envahisseurs américains. D’immenses camps viennent troubler la quiétude des quelque 1500 civils : le plus gros près du fort, un autre près de l’île Demers et un dernier à la Pointe-Olivier (Saint-Mathias-sur-Richelieu). Les militaires sont partout. 

Rapidement, l’état-major reçoit des plaintes des habitants de la seigneurie. Le marché ne peut se tenir régulièrement, les militaires achetant directement chez les habitants tout ce que ceux-ci pourraient y porter. Les femmes qui s’y rendent en canot sont « insultées et décontenancées par des hommes se baignant », fort probablement nus. Le curé Médard Pétrimoulx, gardien des bonnes mœurs de ses ouailles, a certainement relayé cette dernière aux généraux. La pudeur des femmes de la seigneurie est menacée par les comportements scandaleux des soldats, il faut agir!

Un ordre général émis le 28 juin 1776 vise à contenir ces débordements. Les autorités militaires interdisent donc aux soldats d’arrêter les habitants apportant des vivres au marché pour acheter ces vivres. Le marché se tiendra les lundi, mercredi et vendredi de six à neuf heures du matin à l’église de Chambly. Des patrouilles et des gardes placées autour des camps militaires veilleront au grain. 

Finalement, pour préserver les bonnes mœurs et la pudeur des femmes,

« Les hommes de chaque régiment qui veulent se baigner (une pratique qui doit être encouragée comme hautement bénéfique pour la santé) seront assemblés à une certaine heure chaque matin et soir sous l’autorité d’un officier ou d’un sous-officier. Pas plus d’une demi-heure ne leur sera allouée pour cette fonction et aucun homme ne pourra se baigner à tout autre moment de la journée ».

Le curé Pétrimoulx peut à nouveau dormir sur ses deux oreilles.