Destiné à ne pas aspirer au pouvoir
Mettant de l’avant les intérêts du Québec à Ottawa, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, est destiné à ne pas aspirer au pouvoir. Il en parle avec le journal, qui est allé à sa rencontre dans la capitale nationale canadienne.
Le Journal de Chambly s’est invité au Parlement du Canada, à Ottawa, où il a sillonné ses nombreux corridors répartis dans des ailes hautement sécurisées. Au même moment, Brian Mulroney, ancien premier ministre du pays, y était exposé en chapelle ardente, pour une foule venue lui rendre un dernier hommage.
Bousculé entre la période de questions de la Chambre des communes, qui s’y déroule l’après-midi, et un rendez-vous avec un ambassadeur, Yves-François Blanchet, député fédéral de la circonscription de Beloeil-Chambly, a accueilli les représentants du journal dans son modeste bureau. Sur sa surface de travail, deux figurines de Star Trek rappellent qu’il en est amateur depuis l’installation du téléviseur en noir et blanc au salon de sa demeure, lors de son enfance.
« Il y a beaucoup de manières d’aider les gens. Ce n’est pas juste être ou ne pas être au gouvernement. » – Yves-François Blanchet
Sur un mur, deux photographies prises par Antoine Désilets, de Jacques Parizeau et de René Lévesque, se démarquent et attirent l’attention. Une caricature à l’effigie de M. Blanchet, découlant de la plume de Serge Chapleau, témoigne d’une forme de consécration pour l’homme politique.
À la Chambre des communes, 32 bloquistes siègent parmi les 336 députés canadiens. Concentré au Québec, le parti ne sera statistiquement jamais porté au pouvoir. Le gourmet de science-fiction souligne toutefois « qu’il y a beaucoup de manières d’aider les gens. Ce n’est pas juste être ou ne pas être au gouvernement », nuance le député de la circonscription tout en énumérant divers dossiers qui auraient progressé en raison de l’apport de son parti.
Traité de fou
Yves-François Blanchet a accepté de devenir le meneur du Bloc québécois, il y a maintenant cinq ans. Il s’est fait « traiter de fou » quand il a pris les rênes de ce parti qui battait de l’aile en 2019. Alors situé à environ 12 % dans les intentions de vote, le Bloc a grimpé au-dessus de la barre des 30 % lors de la campagne des élections fédérales de 2021. « C’était comme une aventure », résume le chef, face à des attentes qu’il qualifie de peu élevées. Il soutient que la pression se fera davantage sentir lorsque la population sera appelée à voter en 2025.
Faut-il l’être, un peu fou, pour avoir accepté ce mandat, celui de redresser un parti qui n’avait su faire élire que 10 députés en 2015 et 4 en 2011, plus faibles statistiques depuis la fondation de l’organisation politique? Le député de Beloeil-Chambly reconnaît que faire de la politique représente un engagement intense et prenant. « Si tu ne fais pas attention, ça coûte des familles », remarque-t-il. Il mentionne avoir désormais l’expérience permettant de maintenir une forme d’équilibre dans sa vie. « Il reste que c’est un métier qui peut être très destructeur tout en étant passionnant », ajoute l’homme. Il convient que du temps de présence avec ses enfants, il en a sacrifié relativement à plusieurs autres types de carrière. Or, même en présence de sa famille, une discipline demeure nécessaire pour sortir la politique de sa tête. « Sinon, le temps avec ton monde, ce n’est pas du temps de qualité », confie-t-il.
Yves-François Blanchet se dit maintenant « prudent » quant à préserver sa vie privée du domaine public.
Drogue dure
Yves-François Blanchet compare l’exercice politique à une « drogue dure ». À la Chambre des communes du Canada, là où ont notamment débattu aux côtés de leur troupe respective Justin Trudeau, premier ministre du Canada sous la bannière libérale, Pierre Poilievre, chef du Parti conservateur du Canada, et Yves-François Blanchet lors de la présence du journal, on sent une exaltation grisante que confirme M. Blanchet. « C’est très nourrissant », admet le principal intéressé.
Un spectacle superficiel
Sur une tablette de l’étagère installée dans le bureau du chef du Bloc, un Félix, statuette remise lors du Gala de l’ADISQ, évoque qu’il est issu du milieu du monde du spectacle à titre d’agent d’artistes. N’ayant pas connu la scène, il est cependant désormais celui en position de notoriété. « Ça fait quelque chose, d’avoir une salle de gens enthousiastes qui apprécient ce que tu dis », compare-t-il avec le domaine artistique. Il laisse par contre entendre que la période de questions n’est pas représentative de ce que devrait être la période parlementaire. « C’est le côté le plus mesquin et superficiel de la politique. On est dans l’extrême » cour d’école » de la chose. Je ne crois pas que ce soit un spectacle de grande qualité », considère celui qui, comme ses homologues, joue son rôle dans l’arène.
Libéraux ou conservateurs?
Après les élections fédérales de 2025, les députés du Bloc siégeront entourés d’un gouvernement libéral ou conservateur. Avec lequel de ces partis le Bloc préfère-t-il travailler? « Le Bloc travaille pour les Québécois, peu importe qui est là », termine Yves-François Blanchet en considérant que les politiques libérales et conservatrices se ressemblent en plusieurs matières.