Chambly : victoire contre l’adversaire sournois qu’est le cancer

La boxeuse Martine Vallières-Bisson (MVB) se réapproprie son corps après avoir vaincu le cancer, qu’elle a combattu un round à la fois.

L’entraîneuse du Crew Gym de Chambly s’y connaît en matière de combat. Sa fiche de six victoires et deux défaites chez les pros en témoigne. C’est toutefois un adversaire sournois qui l’attendait dans l’arène de sa vie alors que le cancer du sein s’est emparé de son corps.

Après sa chimiothérapie, la pugiliste est passée à travers une vingtaine de traitements de radiothérapie. En décembre prochain, elle vivra son huitième mois de rémission. « Je me reconstruis un pas à la fois », nous fait part la femme. Son corps, elle avait l’habitude de le pousser. « Des fois, c’est frustrant. T’as l’impression de ne pas habiter ton corps. Tu n’es pas dans tes ressentis physiques », soutient la sportive, qui vit des douleurs articulaires et ligamentaires. « Mais c’est rien par rapport à ce que j’ai vécu », convient celle qui est en voie de guérison.

Apprendre à recevoir l’aide

Pendant l’entrevue, qui s’est déroulée dans son environnement naturel, ceux qui passent lui déposent amicalement une main sur l’épaule et la salue avec courtoisie. À l’aube de ses 40 ans, l’humaine intense effectue un retour progressif à l’entraînement. Habituée à un rythme de vie effréné que lui procurait sa passion, elle adopte désormais une cadence plus posée. « Je suis dans le ici et maintenant. Il faut que ce temps d’arrêt dû à mon cancer m’ait appris à cibler mes priorités », définit MVB.

À travers l’épreuve, il a aussi été question qu’elle apprenne à recevoir de l’aide. « C’est ce qui a été le plus dur. Il a fallu que je me mette dans cet état d’esprit d’acceptation », admet-elle avec humilité. 

Carrière professionnelle

Son dernier combat professionnel remonte au 5 mai 2023, au Mexique. À l’issue de ce duel, elle revenait sur le chemin de la victoire après avoir encaissé deux revers, dont un en Pologne. Dans les jours qui ont suivi cette victoire se sont enchaînés échographie, mammographie, biopsie et le résultat fatidique menant à sa mastectomie partielle pour retirer la tumeur.

Aujourd’hui, elle souhaite effectuer un retour et faire « au moins un autre combat » professionnel pour ne pas que ce soit le cancer qui mette un terme à sa carrière. « Beaucoup n’y croient pas. Moi, j’y crois sincèrement. Si mon corps ne me le permet pas, je ne le forcerai pas, je le respecterai : on ne joue pas à la boxe », précise-t-elle.

Jake Paul et la boxe féminine

Le 15 novembre dernier a eu lieu le combat mis en œuvre par le détesté Jake Paul contre Mike Tyson, âgé de 58 ans. Plus de 72 300 spectateurs ont fait le déplacement à l’AT&T Stadium au Texas, remplissant l’arène à pleine capacité. La billetterie a généré 17,8 M$. Netflix a explosé les compteurs avec 65 M de téléspectateurs simultanés. Au total, l’événement a rapporté plus de 150 M$. MVB n’avait jamais regardé de combat de Jake Paul. Comme beaucoup, elle s’est laissée prendre au jeu cette fois. « Je ne peux pas concevoir qu’un youtubeur fasse plus d’argent que les grands du monde de la boxe », dit-elle. Au-delà de l’argent, elle a eu peur qu’un « malheur » n’arrive à l’un des deux protagonistes.

Si plusieurs ont qualifié le combat entre Tyson et Paul de cirque, il en a été tout autre pour l’affrontement entre Katie Taylor et Amanda Serrano, qui les ont précédés. Le duel épique, sur les lèvres de tous le lendemain, a marqué les spectateurs. Il a également permis aux deux boxeuses de toucher une bourse de 6,1M $, un record chez les femmes. « C’est quand même grâce à lui (Jake Paul) qu’elles touchent ces bourses considérables. Il les met en avant-plan sur ses cartes de boxe », retient positivement MVB en matière de visibilité, de crédibilité et de finances. Le combat Taylor – Serrano est d’ailleurs devenu l’événement professionnel féminin le plus regardé de l’histoire.

L’entraîneuse se rappelle que, quand elle a commencé à boxer à 16 ans, des gyms de boxe n’acceptaient pas les femmes ou n’avaient tout simplement pas de vestiaires pour celles-ci. Aux Jeux olympiques, les femmes n’ont été admises qu’en 2012 en ce qui a trait à la boxe. À ce moment, 36 femmes, venues de 23 pays, avaient pris part au tournoi olympique inédit, réparties en trois catégories de poids. Elles étaient alors sept fois moins nombreuses que leurs homologues masculins répartis dans 10 catégories.

Kim Clavel dans le portrait

En septembre dernier, MVB a participé au Marathon Beneva de Montréal. Elle y a couru 10 km pour la Fondation cancer du sein du Québec, en compagnie de la boxeuse notoire Kim Clavel. À son rythme, elle a franchi la ligne d’arrivée, dans un moment qu’elle qualifie d’émouvant. MVB encense l’apport de Kim Clavel pour la boxe féminine au Québec. Les « petites filles » désireuses de faire comme elle sont nombreuses à la tenir pour modèle et à vouloir suivre ses pas.