Interdiction de filmer les séances du conseil: Chambly punira les contrevenants

La Ville de Chambly a officiellement interdit la captation vidéo des séances du conseil municipal lors d’une séance extraordinaire le 12 décembre.
Toute personne qui contreviendrait à ce nouveau règlement pourrait écoper d’une amende de 100 $ pour une première infraction. En cas de récidive, le montant grimpera à 200$ et jusqu’à un maximum de 500$. Ces montants ne comprennent pas les frais d’infraction.
L’enregistrement audio des assemblées et la prise de photo sont toutefois encore permis.
« Rien dans la réglementation actuelle ne l’interdit présentement », a déclaré Jean Roy, maire suppléant.
Plusieurs citoyens ont clairement manifesté leur opposition à ce nouveau règlement interne.
La motion a été adoptée à la majorité avec quatre conseillers en faveur et trois contre.
«C’est un peu contre-courant! C’est tellement 2017 de faire ce type de vidéo-là. Comme élu, on a un rôle d’éducation du public, d’encourager le public à s’intéresser à la chose municipale. C’est sûr que la captation vidéo, c’est un bon outil  pour intéresser les gens à la politique municipale», a commenté Mario Lambert, un des conseiller qui a voté contre le règlement.

Transparence

Plusieurs citoyens présents à la séance ont affirmé que la Ville nuisait à la transparence en adoptant ce nouveau règlement.
« Je trouve que c’est une aberration quand on compare avec tout ce qui se fait au Québec. Plusieurs villes vont filmer elles-mêmes les séances du conseil et les diffuser sur le web pour permettre aux citoyens de rester informer sans avoir à se déplacer à l’hôtel de ville », soutient Patrick Dufresne, candidat du parti Démocratie Chambly aux dernières élections.
« Vous savez, il n’y a pas un tribunal qui permet la captation vidéo lors d’une séance et ce n’est pas parce que ça manque de transparence. Donc, de dire qu’on manque de transparence c’est faux », conteste M. Roy.
M. Dufresne a d’ailleurs déposé une plainte au ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire (MAMOT) le 8 décembre pour s’opposer à la décision du conseil.
Notons qu’un avis de motion avait été déposé le 5 décembre.
« Ce n’est pas vrai qu’un fonctionnaire ou qu’un commissaire aux plaintes va renverser une décision d’une ville. Ça demeure une recommandation non une obligation », a lancé Jean Roy.
L’interdiction ne s’applique pas à la captation sonore. Par ailleurs, Chambly enregistre l’audio des séances du conseil et les citoyens peuvent écouter cet enregistrement à l’hôtel de ville.
«Les résidants doivent faire une demande au greffe. On va leur donner rendez-vous et prévoir un endroit où ils pourront venir écouter la bande audio. Jusqu’à présent, tous les citoyens qui en ont fait la demande ont pu se déplacer, alors on n’a jamais eu de demande de la part de quelqu’un qui ne pouvait se rendre ici. Si ça arrive, on évaluera selon la demande», affirme Micheline Le Royer, directrice du Service des communications et du protocole.

Intimidation

L’ancienne conseillère du district du Canton, Sandra Bolduc a affirmé lors de la période des questions s’être déjà senti intimidée par quelqu’un qui filmait dans la salle.
« J’ai moi-même été filmée à mon insu lors d’une séance du conseil en novembre. […] On me dit que je suis à une séance publique dans un endroit public. Que je sois dans un parc avec mes enfants, dans une bibliothèque, ou en train de stationner ma voiture, je n’ai jamais donné ma permission pour que cette image-là soit utilisée à des fins politiques, comme elle l’a été », s’est-elle indignée.
Selon le maire suppléant, c’est ce comportement qu’on souhaite éviter avec l’adoption de l’interdiction de filmer.
« Ce n’est pas facile pour tout le monde de venir s’exprimer au micro au sujet de leurs préoccupations ou de leurs demandes à la Ville. C’est encore plus difficile pour eux s’il y a des caméras dans la salle. Ce n’est pas tout le monde qui a la même aisance », a ajouté M. Roy.

Médias

L’interdiction de filmer les séances s’applique également aux médias.
« La captation vidéo va être interdite. C’est ce que la réglementation stipule. Maintenant est-ce que ça fait une différence dépendamment de la personne ? Non. Les journalistes ne seront pas empêchés de faire leur travail », a répondu M. Roy à André Bujold un citoyen qui s’inquiétait du flou dans ce dossier.
« C’est important que ce soit clair. Ma question l’est. Est-ce que les journalistes seront oui ou non empêchés de filmer ? Avez-vous précisé ça dans le règlement ? » a répliqué M. Bujold.
« [Les journalistes] ne seront pas empêchés de rapporter la nouvelle. Non, rien à propos des médias n’a été précisé dans le règlement. Il va falloir, j’imagine, des autorisations particulières, mais rien n’est encore prévu », a déclaré le maire suppléant.
La Fédération professionnelle des journalistes du Québec a vivement dénoncé l’adoption du règlement par communiqué. «Cette interdiction brime la liberté de presse et le droit du public à l’information. La FPJQ rappelle que les séances des conseils municipaux sont publiques et que, de ce fait, elles peuvent et doivent être filmées, enregistrées, diffusées, et ce, sans délai. La FPJQ exhorte la Ville de Chambly à abolir ce règlement antidémocratique», pouvait-on y lire.