Les séquelles post-COVID d’Isabelle Bourassa
Depuis que la famille d’Isabelle Bourassa a contracté le variant britannique de la COVID-19, en mars dernier, son expérience du virus a viré au cauchemar. En entrevue avec le journal, elle se livre de peine et de misère sur les séquelles qui la font souffrir.
Isabelle a 49 ans. Elle est mère de famille et occupe un poste administratif en clinique de télémédecine, qu’elle a été en état de reprendre le 26 avril dernier. « Tout a commencé quand mon plus jeune fils, Justin, est rentré de l’école le vendredi 19 mars. » L’élève de quatrième secondaire à l’école Ozias-Leduc, de même que plusieurs dizaines de camarades ainsi que huit professeurs, ont attrapé la COVID. « Le dimanche suivant, on recevait une lettre de l’école disant que des élèves l’avaient contractée, et le lundi 22 mars, on est allés le faire tester. Assez rapidement, en 24 heures, on a su qu’il était positif. » Justin est resté en confinement jusqu’au 31 mars dans sa chambre, mais cela n’a pas empêché toute la maisonnée d’être contaminée.
« Aujourd’hui, ma santé est hypothéquée (…) si j’avais été prise en charge plus tôt et que l’on avait pris mes symptômes au sérieux, je n’en serais pas là. » – Isabelle Bourassa
Le début d’un long cauchemar
« On l’a tous attrapée par après, mon conjoint, mon fils aîné qui est au cégep, et moi. Mon plus vieux a eu un mal de gorge, des maux de tête et des étourdissements. Mais pour lui comme pour mon mari, c’est parti au bout de dix jours. Justin, quant à lui, a perdu l’odorat pendant un certain temps », de raconter Isabelle, entre deux essoufflements. Encore aujourd’hui, son fils Justin dit ressentir une fatigue anormale. Mais celle qui en a été gravement affectée, c’est Isabelle. « Je l’ai vraiment eue solide. Je fais un peu d’hypertension, je suis en surpoids, mais ça affecte autant l’athlète que la personne atteinte d’obésité. »
Une prise en charge tardive
« Ça a commencé le 30 mars. J’ai fait de la fièvre pendant 11 jours. J’avait été testée positive et j’ai essayé par trois fois une clinique chaude pour voir un médecin. Les trois fois, le personnel y allait au son. On ne faisait qu’écouter mes poumons. On me disait que ça ne crépitait pas, que l’on n’entendait pas de bulles. Je disais qu’il n’y avait pas que la fièvre, mais aussi la perte d’appétit et d’énergie, et je sentais que ma santé se déclinait. » La troisième fois, Isabelle s’est présentée aux urgences de l’Hôpital Charles-Le Moyne, où elle a été vue par un médecin qui l’a retournée en clinique chaude. « Là-bas, on a décidé de me faire hospitaliser et je suis revenue à Charles-Le Moyne. Là, une médecin m’a dit que l’on me ferait passer des tests sanguins, mais que si tout était beau, on me renverrait chez moi. On ne voulait toujours pas me faire passer de radiographie aux rayons X. Je suis retournée chez moi et j’ai continué de faire de la fièvre. » Sur les conseils d’un ami ambulancier paramédical, Isabelle s’est procuré un saturomètre pour mesurer la saturation de ses poumons à domicile. Le lendemain de sa visite à l’hôpital, elle a vu que la saturation de ses poumons avait baissé à 82 %. « Je reçois un appel de la santé publique, qui prend connaissance de la situation, et trois minutes plus tard, on me rappelle pour me dire de me rendre à l’urgence en ambulance. »
Isabelle est emmenée d’urgence à l’Hôpital du Haut-Richelieu, puis transférée à l’Hôpital Charles-Le Moyne, où l’on est équipé pour garder des patients COVID. Elle restera de quatre à cinq jours aux soins intensifs. « Après ça, c’était la convalescence. Tu passes d’une infirmière pour une à deux chambres à une infirmière pour une quinzaine de portes. Ce sont des horaires de fou et le personnel est débordé. Je suis restée neuf jours à l’hôpital. Aujourd’hui, ma santé est hypothéquée. Si je marche longtemps, je suis essoufflée. J’ai, par moments, des palpitations, des maux de tête, des problèmes de concentration et des fatigues. Je suis convaincue que si j’avais été prise en charge plus tôt et que l’on avait pris mes symptômes au sérieux, je n’en serais pas là. J’ai été sauvée de justesse. J’ai au moins eu un bon suivi de la part des professionnels de la santé publique, sans qui j’aurais probablement eu des séquelles plus graves. »
Des mesures jugées insuffisantes
« Les cliniques chaudes minimisent les symptômes. Si l’on ne nous y trouve pas à l’article de la mort, que l’on n’entend pas le mucus dans nos poumons de façon évidente, on nous refoule », déplore Isabelle. « On filtre avec parcimonie, au détriment de patients dans ma situation, et on n’y fait pas certains tests qui devraient pourtant être indiqués. On devrait y être équipé pour faire des rayons X sur place. Je suis vraiment contente d’avoir insisté pour me faire tester et d’avoir persisté pour être prise en charge. Sans cela, ça aurait été bien pire. Je ne mangeais presque plus, je m’affaiblissais et ma pression avait beaucoup baissé. En écoutant seulement les cliniques chaudes et sans la santé publique, je serais restée à la maison à voir ma santé se dégrader de plus belle. »
Des efforts de sensibilisation
Isabelle souhaite éveiller les consciences quant aux risques liés à la COVID. À l’hôpital, elle a créé des vidéos qu’elle a diffusées sur les médias sociaux afin de montrer sa réalité et de donner des mises à jour quant à son début de convalescence. « Aujourd’hui, ça commence à s’améliorer, mais après 50 mètres de marche, je m’essouffle. J’ai fait des capsules en direct pour montrer aux gens et aux sceptiques que la troisième vague est réelle et à prendre au sérieux. Il y en a qui ont des séquelles après un an et certains pour qui c’est très difficile et très grave. Ils font un pas et sont complètement épuisés. Des cliniques qui étudient le phénomène, appelé “COVID long”, existent notamment à Sherbrooke et à Montréal. » Isabelle devra attendre trois mois avant de pouvoir être vaccinée contre la COVID. « Je devrai faire vérifier mon taux d’anticorps. On déterminera aussi si j’aurai besoin d’une dose ou deux. Les informations viennent au compte-gouttes et ça change tout le temps, alors on verra bien. »