Motion sur le projet de loi 96 : plus qu’une question de temps
Le 26 mai dernier, à la chambre des communes du Canada, la députée indépendante Jody Wilson-Raybould s’est opposée à l’adoption de la motion déposée par le Bloc québécois sur le projet de loi 96, alors que tous les partis importants y ont adhéré. Le chef du Bloc et député de Belœil-Chambly, Yves-François Blanchet, dresse un portrait global de la situation.
« Le gouvernement du Québec a déposé un projet de loi dans lequel il modifie, par sa propre décision, la constitution du Canada, pour y insérer la nation québécoise, dont la seule langue officielle est le français, et dont la seule langue commune est le français. Auparavant, on se chamaillait sur l’enjeu d’une notion très vague de société distincte ou de nation québécoise au sein d’un Canada uni. Là, on est dans l’affirmation franche du fait que c’est une nation française. Nous avons déposé la motion car nous voulions que le fédéral prenne acte de cette volonté de l’Assemblée nationale du Québec, de façon consensuelle et non conflictuelle avec le Canada. »
« (…) environ 99 % du parlement était d’accord avec nous. C’est un énorme progrès (…) presque l’unanimité au parlement canadien sur la franche idée d’une nation française. » – Yves-François Blanchet
Un consensus fédéral
Notons que les libéraux, les conservateurs et les néo-démocrates ont tous soutenu la démarche. Pour le bloquiste, le consensus qui a régné parmi les élus en faveur de la motion, malgré une poignée d’insoumis, représente une avancée certaine. « Au-delà du fait de faire passer ou non la motion dans l’immédiat, nous avons fait du progrès, car le fédéral va devoir se comporter de façon cohérente avec la position qu’il a prise en reconnaissant le Québec comme une nation française. », observe-t-il. Il ajoute que « Seulement quatre personnes n’étaient pas d’accord, et une seule d’entre elles a été identifiée. Cela signifie qu’environ 99 % du parlement était d’accord avec nous. C’est un énorme progrès, quand on pense qu’on avait des grosses polarisations agressives entre le Canada et le Québec à l’époque de la société distincte. On a maintenant presque l’unanimité au parlement canadien sur la franche idée d’une nation française. »
Ce n’est que partie remise
Étant donné qu’il lui reste une journée d’opposition avant le congé estival, qui débutera le 23 juin, le Bloc reviendra à la charge. « La prochaine fois, ce sera par vote par appel nominal, lors d’une journée de l’opposition déterminée par le gouvernement que l’on procédera. Avec ça, dès qu’on est majoritaire, ça passe. »
Sa réponse à Mme Wilson-Raybould
Véhémente sur les médias sociaux, Mme Wilson-Raybould fait valoir que d’adopter des modifications aussi importantes dans la constitution serait une manière d’ « éviter le débat » en perdant toute perspective juridique. Pour M. Blanchet, ses motifs ne sont « pas clairs. Elle doit avoir des raisons qui justifient son désaccord, mais elles restent à clarifier. Je l’invite à utiliser la journée d’opposition, lors de laquelle les gens pourront s’exprimer, pour s’expliquer. »
La députée a affirmé qu’elle était prête à discuter de nation et de langue, en tant que « fière femme d’une Première Nation ». À cela, le chef du Bloc répond que « C’est bien connu, le Bloc québécois, et moi en particulier, avons une affection marquée pour les Premières Nations, et je leur souhaite tout le respect qu’on leur doit. J’attends la réciprocité dans ce contexte-là, mais ce n’est peut-être pas du tout son motif. C’est peut-être de nature juridique pour elle, mais de mon point de vue, l’enjeu est politique. Il en va de la motivation et de la cohérence des choix du gouvernement canadien, qui ne doivent pas aller à l’encontre de ceux du Québec. Il ne s’agit pas de fédéralisme contre indépendantisme, autonomisme ou nationalisme. Qu’on loge n’importe où dans le spectre politique, quelque soit l’avenir du Québec, tout le monde est d’accord pour dire que dans l’intervalle, il faut protéger et mettre de l’avant le fait que le français est au cœur de la nation québécoise. »