Carignan : retour de la Patagonie après 462 jours à vélo
Après 462 jours de vélo, le Carignanois Philippe Robin a bouclé son périple, au cours duquel il a traversé le Canada avant de se rendre en Patagonie, complètement au sud des Amériques.
Il a quitté Montréal en juin 2023. Le 16 septembre 2024 constituait son dernier jour de vélo. Il aboutissait du côté argentin de la Patagonie qui se divise avec le Chili. Avant de revenir au Québec, le 12 octobre dernier, il a fait du bénévolat trois semaines sur place dans une auberge de jeunesse. « Ça m’a fait du bien de recommencer à socialiser tranquillement avec les touristes tout en me reposant », avance celui qui a effectué un retour serein, physiquement et psychologiquement, au pays
Séquestré par les narcotrafiquants
Le journal s’était entretenu avec Philippe en mai dernier. Déposé à Carhuamachay, petit village dans les Andes péruviennes, il en était alors à sa 337e journée sur la route et avait franchi la barre des 20 000 km.
À ce moment, la Colombie était déjà derrière lui. Toutefois, il n’avait pas raconté la péripétie suivante, tout comme il s’était abstenu de la relater à sa famille et de la dévoiler sur ses réseaux sociaux. « Il n’y avait pas de bonnes raisons de leur dire pendant le voyage. Déjà, ils s’inquiétaient. Je ne voulais pas augmenter leurs craintes », soutient-il.
Pendant plus de trois heures, il a été séquestré par des narcotrafiquants. « Ils pensaient que l’on venait espionner ou quelque chose comme ça », explique Philippe. Fouilles et interrogatoires à répétition sont des manœuvres que son ami Alexis, venu le rejoindre au Costa Rica, et lui ont vécues.
Alexis, qui a passé cinq mois avec Philippe, ne parlait pas espagnol. Dans l’incompréhension, il était à la merci des échanges entre Philippe et les narcotrafiquants. « C’est le genre de journée que tu n’oublies pas. Tu as le temps de t’imaginer tous les pires scénarios possibles », admet le cycliste, qui a su les convaincre qu’ils ne représentaient pas une menace.
Désert de sel Salar d’Uyuni
Dans les Andes, au sud-ouest de la Bolivie, le Salar d’Uyuni est la plus grande étendue de sel du monde. Ce paysage désertique de presque 11 000 km² composé de sel d’un blanc éclatant, de formations rocheuses et d’îles parsemées de cactus est né à la suite de l’assèchement d’un lac préhistorique.
Philippe Robin visualisait, à ce moment, l’endroit où il le franchirait. Le chemin qu’il a sélectionné pour le traverser s’étalait sur 200 km. Il l’a complété en deux jours. « T’as l’impression de faire du vélo stationnaire pendant tout ce temps », compare-t-il. Y trouver ses repères, sans boussole, est complexe. « Il n’y a presque rien à l’horizon. C’est facile de perdre sa trajectoire sans s’en rendre compte », convient-il. En cette vaste étendue, des volcans se dressent. Philippe Robin indique qu’il est possible de s’en servir comme guides. Sinon, Google Maps pouvait l’aviser de la direction souhaitée au préalable.
Philippe Robin raconte que c’est dans la « tradition du vélo » d’en faire un tronçon nu. C’est dans ce segment de voyage qu’il a croisé le moins d’humains. « C’est tellement grand, il n’y a pas de danger d’être vu », explique le cycliste, naturiste pour l’occasion.
Retrouver les siens
Dans son esprit, il anticipait le moment des retrouvailles. Bien qu’agréables, le globe-trotter avance qu’elles peuvent avoir un côté envahissant, particulièrement en grand groupe. « Après avoir passé énormément de temps seul, c’est pas simple à gérer », affirme-t-il.
De pédaler tous les jours à avoir beaucoup de temps libre, ici, désormais, Philippe est en transition. Il digère encore ce qu’il a vécu. Il met du temps sur l’écriture d’un livre relativement à ce long périple. Il envisage aussi des conférences. « Je me retrouve un peu face à rien. J’ai comme besoin de me retrouver un nouvel objectif », fait savoir celui qui passe actuellement des entrevues dans le domaine des communications.
De Montréal, son amoureuse est maintenant à Sherbrooke. Philippe Robin y vit aussi. « Dans un prochain projet, elle serait impliquée. Si je disais que je repars l’été prochain pour 16 mois, je pense que la conversation se passerait mal », confie-t-il en riant.
Le vélo dans la peau
À 15 ans, Philippe faisait Montréal-Québec à vélo. L’année suivante, il se rendait cette fois en Gaspésie. Au secondaire, il lisait déjà des récits de voyages de cyclistes. Entre 15 et 23 ans, il a travaillé dans des ateliers de réparation de vélos. Le vélo a toujours été un élément central de sa vie.
La Fondation sablon
Derrière ce périple, il y a la Fondation sablon. Philippe Robin a amassé de l’argent pour cet organisme qui aide les jeunes en milieu défavorisé à pratiquer des sports. Il endosse cette cause, faisant un lien avec son enfance. « J’étais hyperactif. Mes parents m’ont mis en Sport-études au secondaire. Ça a changé ma vie », exprime-t-il. Il relate avoir failli redoubler plusieurs années au primaire. Au secondaire, ayant l’occasion de dépenser son énergie, il arrivait à se concentrer à l’école. Ses notes ont d’ailleurs augmenté de manière significative. « Mais je suis conscient que ces programmes coûtent de l’argent et si mes parents n’avaient pas pu me le payer, je ne serais probablement jamais allé à l’université », avance-t-il.